Au village, on se remémore l’époque pas si lointaine où de nombreux bergers arpentaient les montagnes de la commune. « Il fut un temps, il y en avait 80 à Ascu », raconte Pierre Franceschetti, élu de la municipalité. En ce temps-là, la montagne donnait tout aux hommes. Et c’est cette montagne qui les a forgés, sculptant dans la roche le village et son histoire, ici, au pied du Monte Cintu. Aujourd’hui, la commune compte peu d’éleveurs, mais bien implantés sur le territoire. Et axe son développement sur la préservation de son patrimoine naturel - une faune et une flore exceptionnelles - ainsi que sur l’essor des activités de nature, avec la réouverture de sa station de ski, mais aussi la randonnée avec le GR20, le canyoning ou encore le VTT. Une manière de valoriser le territoire pour améliorer la qualité de vie des habitants et permettre la croissance harmonieuse de sa population. Ascu est aussi fortement liée à son histoire. Durant la Seconde Guerre mondiale, les habitants et le maire de l’époque avaient protégé des familles juives au village. « J’ai connu l’époque où il y avait trente troupeaux de chèvres, quinze de brebis et cinq paires de bœufs, se souvient Francis Mercuri, ancien berger qui a vu passer 81 printemps. Avec mon frère, nous avons eu jusqu’à 450 brebis. Chez nous, on est bergers di leva in purleva, de génération en génération. Il y a une ancienne aire tout près où j’ai battu le blé. Je me souviens lorsque, en mai, les chevriers revenaient des Agriates, on entendait les cloches résonner dans le village. Maintenant, on n’entend plus rien », regrette-t-il. Pour autant, le retraité ne se laisse pas abattre : « Je fais le jardin et je marche un peu. Dernièrement, on a fait une marche de 5 heures dans les Agriates avec mon épouse et des amis », lance l’ancien berger, également poète et auteur du recueil Da l’Alba à l’Attrachja. « Francis pratique la rime mais pas les primes ! », s’amuse à son tour Pierre Franceschetti. Le seul désir du berger à la retraite serait de voir « le village uni ». Aujourd’hui, la commune compte trois mielleries, cinq exploitants de vaches et un chevrier. Mais ceux qui ont fait le choix de pratiquer ces activités à Ascu l’ont fait par amour de leur terre, de leur village, de leur montagne. C’est le cas de Christine Vitti. Secrétaire de la mairie depuis 1996, elle s’est également installée comme agricultrice en mai 2013 et possède un troupeau d’une vingtaine de vaches. Tous les matins, elle vient s’occuper de ses bêtes à 7 h 30, puis rentre enfiler un tailleur avant de rejoindre la mairie à 9 heures. François-Antoine, son fils de 15 ans, lui donne régulièrement un coup de main auprès des animaux. « Nos grands-parents étaient éleveurs et bergers. S’occuper des bêtes, c’est viscéral, c’est dans nos racines », révèle-t-elle. Revenir vivre au village, c’était pour elle un véritable choix : « J’ai vécu 24 ans sur le Continent, je n’y retournerai pour rien au monde, appuie Christine Vitti. On a plus d’avantages que d’inconvénients, mes parents vivent à côté de chez moi, les enfants ont appris à skier ici, ils peuvent marcher dans la nature, aller en montagne, à la rivière… L’hiver, je travaille aussi à la station - sauf cette année car, pour le moment, il n’y a pas de neige -, à la location de skis. Le seul bémol, c’est qu’après le collège, il n’y a plus de car scolaire. Mais on s’arrange avec une autre maman de Moltifau qui les emmène jusqu’au lycée de Corte. » Plusieurs services de proximité ont été mis en place pour les 60 à 70 habitants qui vivent au village à l’année, afin d’éviter l’isolement, la désertification et améliorer leur quotidien. En 2011, une agence postale a pris ses quartiers dans le bâtiment communal, face à la mairie. Tous les jours, de 8 h 45 à 12 h 15, du lundi au vendredi, Mathéa Carboni accueille le public depuis l’ouverture de la structure : « Je suis rémunérée par la municipalité et j’ai un chef de service au sein de La Poste, décrit-elle. Dans cette agence, les gens peuvent réaliser des dépôts et des retraits d’argent, poster des courriers recommandés. Mais pour que l’agence postale soit maintenue au village, il faut que les gens la fasse travailler ! » Parallèlement, elle propose, dans la pièce attenante - et à titre privé -, une bibliothèque de prêts qui fonctionne uniquement avec des dons, ouverte aux mêmes horaires que l’agence postale. Celle-ci comporte aussi un coin lecture avec un canapé et des photos anciennes du village : « L’année dernière, avec une amie, nous avons établi une carte avec tous les surnoms du village », révèle-t-elle. Depuis 2014, les habitants bénéficient aussi d’une épicerie, ouverte du lundi au dimanche, tous les matins en hiver et toute la journée en été, située juste à côté. « Comme j’habite au-dessus, les gens peuvent m’appeler s’ils ont besoin de quelque chose et je descends, remarque Laura Carboni, l’épicière du village. Je leur propose produits frais, conserves, dépôt de pain, gaz et tabac. » Jean-Baptiste Guidoni, jeune retraité de 80 ans, vient souvent y faire ses courses et acheter ses cigarettes. « Nous avons refait le bâtiment communal et avons pu y créer six appartements, aujourd’hui loués par des gens du village, note Bernard Franceschetti, le maire. Nous avons aussi remis en état la station d’Asco en 2015 (voir par ailleurs) et possédons une faune et une flore très riche qu’il faut préserver. » À Ascu, les habitants ont compris, comme le philosophe Francis Bacon, que « pour commander à la nature, il faut lui obéir ».Ascu : du pastoralisme au ski, une vie autour de la montagne
Elle partage le Monte Cintu avec Lozzi. Et possède un patrimoine naturel aux allures de bijou dans un écrin. Un atout que la commune veut valoriser pour éviter la désertification et favoriser un développement harmonieux
« Di leva in purleva », la commune évolue
Agence postale et épicerie sur place
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